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mercredi 20 décembre 2017

LES CONTEURS DE MARRAKECH SUR LA PLACE JAMAA EL FNA


"Ils s’appellent Azaliya, Bariz, Nini, Lalla Ourquiya, Lalla Abbouch ou Ssi El Hassan et sont les porteurs de la culture marocaine.
Les conteurs de « l’Halqa » (théâtre en cercle ou de rue) de la Place Jamaa El Fna ou « l’Hlayqia » comme on les appelle, sont des hommes et des femmes originaires de Marrakech, venant de familles pauvres au sein desquelles ils se sont vu transmettre cet art d’expression populaire et traditionnelle, d’une valeur unique.
Leurs voix s’élèvent au milieu de la cacophonie ambiante de la place, symbole de la ville ocre depuis des siècles. L’histoire de Jamaa El Fna remonte aux origines de la ville, à partir de 1070. Très vite, la ville impériale et sa place deviennent symbole de brassage d’ethnies, de classes sociales et de générations.
L’Hlayqia s’installent petit à petit et la majorité se lance dans la transmission orale des contes populaires marocains parfois inspirés des Mille et Une Nuits. Dans leurs spectacles de rue, ils transmettent les contes populaires et animaliers mais racontent également le Maroc, Marrakech, la culture, les cultures, les problèmes de société et l’actualité. Leurs histoires commencent souvent par « Kan ya ma kan » (il était une fois) et se terminent toujours avec une morale faisant références aux valeurs de la société marocaine et à l’Islam, où le Bien l’emporte sur le Mal, l’Amour sur tout le reste.
Ils s’expriment en dialecte marocain avec l’accent Marrakchi amusant pour certains, source de nostalgie pour d’autres. L’Hlayqia content avec beaucoup d’humour et de dérision en utilisant des paroles, des gestes, des calembours, des mimiques et un ton qui leurs sont propres. Ils font même de la création lexicale qui fera ensuite le tour de la ville à travers les générations. Ils s’arrêtent pour solliciter l’attention des passants ou pour taquiner un auditeur.   
halka_marrakech
Ces contes pleins d’aventures et de voyages peuvent durer une heure ou un an. Les conteurs aiment et utilisent le suspens pour que leurs auditeurs reviennent. Ces derniers sont généralement des locaux amoureux de cette tradition, des commerçants de la place venus s’évader un moment, ainsi que les touristes nationaux et internationaux qui retrouvent ou découvrent cette tradition avec amusement. Libre à eux de donner une pièce à l’artiste.
En 2001, l’Unesco déclare la place Jamaa El Fna patrimoine oral et immatériel de l’humanité. Les conditions étant le caractère unique et exceptionnel de la manifestation ainsi que le témoignage d’une tradition culturelle vivante mais menacée d’extinction.
Aujourd’hui, ces conteurs à la mémoire et à la culture générale extraordinaires ne sont plus que 7, ils sont âgés et sont restés anonymes. Ils viennent moins souvent sur cette place et ont du mal à transmettre cet art populaire aux nouvelles générations pris dans la standardisation culturelle. Ils ont peur pour cette tradition ancestrale et sont désavoués par une société qui ne leur porte plus la même attention qu’à l’époque et qui n’a plus le temps.
Si un jour vous passez par Marrakech, allez sur cette place et prenez le temps de vous arrêter et de savourer quelques instants devant l’un de ces conteurs. Vous serez transportés dans un autre monde et vous réaliserez alors le caractère exceptionnel de cet homme ou de cette femme qui a le mérite de porter une culture sans aucune arrière pensée sinon celle de transmettre une tradition et des valeurs auxquelles il ou elle est attaché(e) et dans lesquelles nos ancêtres ont grandi."

Ces artistes marocains – Kenza Chkili ©

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